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étéocle et polynice.

vait être fatale : patentes et latentes, directes et indirectes, visibles et invisibles. Après avoir triomphé du monde entier pour ainsi dire, surgit le plus grand des périls : la lutte contre égaux, les combats contre les camarades, contre le frère, autre moi-même. Ces petits d’une même portée ont prospéré. En d’excellentes conditions ils vont mesurer leurs forces ; le plus robuste accomplira le grand acte physiologique, et perpétuera l’espèce. « Au plus fort la plus belle ! » La guerre est un fait primordial, un article organique de la charte octroyée par la nature aux populations primitives. La lutte fouette le sang, réveille les énergies endormies, supprime les faibles par la mort immédiate ou par la mort indirecte, en ce sens qu’ils ne se reproduiront pas. Fêtes et banquets, autant de prétextes à rixes et batteries ; les mâles, façonnés d’un plus grossier limon que les femelles, semblent ne pouvoir mieux s’amuser qu’à coups de poing, de pied, de pierres, de bâton. Encore au commencement de ce siècle, en plusieurs cantons de l’Irlande, des Galles anglaises et de la Bretagne française, les adultes se donnaient, les dimanches après midi, la satisfaction de s’enivrer, puis de s’entre-cogner. Au Velay, dans l’Aragon aussi, en mainte autre province, il était beau de dégainer le couteau, de le brandir, puis d’envelopper une partie de la lame avec le mouchoir : « Ohé ! ohé ! Qui des gars veut goûter de ma pointe ? À deux pouces de fer ? À trois pouces, à quatre pouces ? Qui en veut du joujou ? Qui en veut ? En avant les amateurs ! »

Les populations sauvages de l’Inde et de l’Indo-Chine ont aussi leurs luttes héroïques. Une ou deux fois par an, les mâles se rassemblent ; pour se dégourdir, ils se prennent aux cheveux, se houspillent, se bousculent de la