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Page:Redon - À soi-même, 1922.djvu/110

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celle que nous recevons un jour, comme une grâce. Et c’est proclamer la nécessité du loisir.

Le loisir n’est pas un privilège ; il n’est pas une faveur ; il n’est pas une injustice sociale : il est la nécessité bienfaisante par quoi se façonnent l’esprit, le goût, le discernement de soi-même.



L’estampe est une empreinte sur papier, une empreinte d’art unique ou multipliée, qui exige à l’impression un intermédiaire humain : le cliché laissant toute liberté favorable à la sensibilité de qui imprime. De là, la diversité des épreuves qui attend le choix et suppose le petit nombre, la rareté. Autrefois, l’amateur connaissait bien la bonne épreuve.



Un portrait est l’image d’un caractère, d’un être humain, représenté dans son essence. Toute la vie profonde qui le manifeste pour nous au dehors : attitude, expression, densité morale.



J’aime mieux l’esprit de Degas que l’esprit de ses ouvrages.



Toute cette humanité de l’œuvre de Rodin n’en est pas une : les êtres qui s’y agitent et s’y tordent, hystérisés, me semblent mus par une électricité de mort, âme absente.



Il n’est pas bon de faire des confidences, on ne les comprendrait pas : du moins pour ce qui est notre genèse. On me dit que Carrière, qui est fin cependant, s’est vanté de n’avoir jamais voulu peindre, et qu’il reste indifférent à la peinture elle-même. Il se dit visionnaire jusqu’à pouvoir extraire une expression humaine d’un caillou,