l’état exclusif et dominant de son être intérieur. Ce qu’on retrouve partout, presque d’un bout à l’autre de son œuvre, c’est l’homme épris de solitude, fuyant le monde, fuyant éperdument sous un ciel sans patrie, dans les angoisses d’un exil sans espoir et sans fin. Ce rêve, cette anxiété constante apparaît sous des phases les plus diverses. Quelquefois, c’est sous la forme de l’enfant divin, dans la Fuite en Égypte si souvent reproduite par l’artiste. Parfois c’est toute une famille, une légion, une armée, toute une peuplade fuyant, toujours fuyant, l’humanité civilisée.
Voilà surtout ce qui caractérise M. Bresdin. Voilà ce que les maîtres de la Hollande ou de l’Allemagne n’ont pu lui donner, car ce côté de l’art humain et philosophique est une qualité dont s’enorgueillit l’école française.
C’est donc aussi parmi les eaux-fortes et les dessins originaux qu’il faut chercher la vraie signification de cette individualité. C’est dans ces trois procédés qu’il faut l’étudier pour arriver à la bien comprendre. Aussi, si la Ville consent à posséder le souvenir de cet artiste, qu’elle le choisisse dans ce qui donne son expression la plus complète, et qu’elle mette surtout dans ce choix tout le discernement que demande une chose aussi sérieuse, aussi chère aux vrais amateurs.
Nous croyons souvent que les êtres qui se vouent à l’art n’obéissent qu’à un goût ou un penchant frivole ; si nous y regardons de plus près, si notre attention devient plus éclairée, nous y verrons que c’est quelquefois le lot des consciences les plus pures et les plus sévères.
Aussi, si l’on veut vraiment enrichir les collections publiques d’œuvres dignes d’être imitées, si l’on cherche ces œuvres parmi les artistes de mérite qui donnent à l’art des influences nouvelles, nous les trouverons toujours chez ceux qui joignent à la beauté du talent ce louable désintéressement qu’accompagne toujours la sincérité.
Ces natures rares demandent peu qu’on parle d’elles ; leur seul