Page:Regnard - Œuvres complètes, tome troisième, 1820.djvu/20

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Depuis vingt ans et plus son extrême insolence
Me fit quitter Argos, le lieu de ma naissance :
J’erre depuis ce temps, de climats en climats,
Et j’ai dans ce désert enfin fixé mes pas.
Quelques maux que j’endure en ce lieu solitaire,
Je me tiens trop heureux d’avoir pu m’en défaire ;
Et je suis convaincu que nombre de maris
Voudroient de leur moitié se voir loin à ce prix.
Thaler vient. Le manant, pour notre subsistance,
Chaque jour du village apporte la pitance.
Il nous fait bien souvent de fort mauvais repas :
Il faut prendre ou laisser, et l’on ne choisit pas.


Scène II.

STRABON, THALER.
thaler, portant une sorte de jonc et une grosse bouteille garnie d’osier.

Bonjour, Strabon.

strabon.

Bonjour, Strabon.Bonjour.

thaler.

Bonjour, Strabon. Bonjour.Voici votre ordinaire.

strabon.

Bon, tant mieux.
Aujourd’hui ferons-nous bonne chère ?
Depuis deux ans je jeûne en ce désert maudit.
Un jeûne de deux ans cause un rude appétit.

thaler.

Morgué, pour aujourd’hui, j’ons tout mis par écuelle,