Page:Regnard - Œuvres complètes, tome troisième, 1820.djvu/21

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Et c’est pis qu’une noce.

strabon.

Et c’est pis qu’une noce.Ah ! La bonne nouvelle !

thaler.

Voici dans mon panier des dattes, des pignons,
Des noix, des raisins secs et quantité d’oignons.

strabon.

Quoi ! Toujours des oignons ? Esprit philosophique,
Que vous coûtez de maux à ce cadavre étique !

thaler.

Je vous apporte aussi cette bouteille d’eau,
Que j’ai prise en passant dans le plus clair ruisseau.

strabon.

Une bouteille d’eau ! Le breuvage est ignoble.
Ce n’est donc point chez vous un pays de vignoble ?
Tout est-il en oignons ? N’y croît-il point de vin ?

thaler.

Oui-da : mais Démocrite, habile médecin,
Dit que du vin l’on doit surtout faire abstinence
Quand on veut mourir tard.

strabon.

Quand on veut mourirAh, ciel ! Quelle ordonnance !
C’est mourir tous les jours que de vivre sans vin.
Mais laisse Démocrite achever son destin :
C’est un homme bizarre, ennemi de la vie,
Qui voudroit m’immoler à la philosophie,
Me voir comme un fantôme ; et, quand tu reviendras,
De grâce, apporte-m’en le plus que tu pourras,
Mais du meilleur au moins, car c’est pour un malade ;