Page:Regnard - Œuvres complètes, tome troisième, 1820.djvu/81

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criséis.

Si j’aime, en vérité, ce n’est que d’aujourd’hui.

démocrite.

Vous m’aviez tant promis qu’aucun homme,
en votre âme,
N’exciteroit jamais une amoureuse flamme.

criséis.

Je n’en connoissois point ; et je les croyois tous
Tels que vous le disiez, et formés comme vous.

strabon, bas, à Démocrite.

Cette sincérité devroit vous rendre sage.

démocrite.

Je sens qu’elle a raison, et cependant j’enrage.
J’ai tort de m’emporter ; reprenons désormais
L’esprit qui nous convient ; rions sur nouveaux frais.
Les hommes, en effet, ont bien peu de prudence,
Sont bien vides de sens, bien pleins d’extravagance,
De se laisser mener par de tels animaux,
Connaissant, comme ils font,
leur foible et leurs défauts.
Il n’en est presque point qui, vingt fois en sa vie,
N’ait senti les effets de quelque perfidie ;
Cependant on les voit, de nouveaux feux épris,
Redonner dans le piège où l’on les a vus pris :
À grand-peine échappés de leurs derniers naufrages,
Ils vont, tout de nouveau, défier les orages.
Continuez, messieurs ; soyez encor plus fous ;
Justifiez toujours mes ris et mes dégoûts.
Ces ris, dans l’avenir, porteront témoignage
Que je n’ai point été la dupe de mon âge,
Et que je comprends bien que tout homme,
en un mot,