Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/172

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des hommes s’étaient soutenus pendant quelque temps en mâchant leurs bottes, leurs guêtres ou leurs selles. Le cuir, étant un produit animal, conserve quelques propriétés nutritives, même après avoir été travaillé ; et je songeai à mes bottines.

Comme je me baissais pour en défaire les cordons, je fus saisi par quelque chose de froid qui me tombait sur la tête ; c’était un filet d’eau. Le chiffon que j’avais mis à la futaille en avait été repoussé, et l’eau s’échappait par l’ouverture que j’avais faite. Mon étonnement cessa dès que j’en connus la cause. Je bouchai le trou avec mon doigt, je cherchai ma futaine de l’autre main, et l’ayant retrouvée à tâtons, je la replaçai le mieux que je pus.

L’accident se renouvela, il se perdit beaucoup d’eau, et je pensai avec terreur que si la chose se répétait pendant que je serais endormi, la futaille serait vide à mon réveil ; il fallait aviser. Par quel moyen ? Cette question me tira de mon abattement ; je cherchai autour de moi une bûchette, un copeau ; je n’en trouvai pas. Je songeai aux douelles de la futaille dont l’extrémité dépassait le fond : c’était du cœur de chêne, recouvert de peinture, et sa dureté défia tous mes efforts. Avec de la persévérance j’y serais peut-être parvenu, mais il me vint à l’esprit qu’il me serait plus facile d’entamer le bois de la caisse ; cela devait être du sapin, et non-seulement