Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/218

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Cependant j’en vins à me dire qu’on peut nettoyer une chose quand elle est sale, et qu’il valait mieux sacrifier un peu d’eau pour laver ma bottine, que d’en perdre une quantité chaque fois qu’il fallait boire.

J’allais mettre ce projet à exécution, lorsqu’une idée bien meilleure me passa par la tête ; pourquoi ne pas faire une tasse avec le drap qui me servait de couverture ? Il était imperméable, je l’avais déjà remarqué ; l’eau qui jaillissait de ma futaille restait sur ma couche sans en pénétrer l’étoffe ; et j’étais obligé de l’en ôter comme j’aurais fait d’un vase. Je pouvais en tailler un morceau, lui donner une forme quelconque, et m’en servir au besoin.

Je coupai donc une bande assez large de mon drap, j’en fis un cornet auquel je donnai plusieurs tours pour en augmenter l’épaisseur, et dont je fermai la pointe en l’attachant avec un reste de mes lacets de bottines. J’eus alors une coupe d’un nouveau genre, qui me rendit autant de service qu’un verre de Bohême ou qu’une tasse du Japon ; désormais je bus tranquillement, sans avaler de travers, sans m’inonder, et sans perdre une goutte du précieux liquide dont ma vie dépendait.