Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/90

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Lorsque j’eus réuni mes deux lanières, je fis à l’une des extrémités de ma bande de cuir une boucle dont le poteau remplissait l’intérieur ; cette opération terminée, je poussai mon nœud coulant jusqu’à la mortaise, et je tirai sur la courroie. Il ne me restait plus qu’à introduire l’autre bout dans l’une des boutonnières de ma veste, et à l’y attacher solidement. J’y parvins après quelques minutes. Ce n’avait pas été sans peine ; mais peu importe, puisque j’avais réussi ; pesant alors sur ma lanière pour en essayer la force, elle m’inspira tant de confiance, que je lâchai le poteau complétement, et me trouvai suspendu sans que rien eût craqué, ni bretelles ni vareuse.

Je ne sais plus si dans l’état où je me trouvais alors, je fus frappé de ce que ma position avait de bizarre. Il est probable que je ne songeai pas à en rire, mais je me rappelle très-bien le sentiment de sécurité qui remplaça ma frayeur dès que le succès eut couronné ce dernier effort. Le vent pouvait souffler avec violence, la mer déferler avec rage, peu m’importait leur fureur, elle ne m’enlèverait pas de la place que j’avais enfin conquise.

Je trouvais certainement la position fort mauvaise ; mes jambes étaient si fatiguées que de temps en temps elles se détachaient du poteau, et je reprenais mon attitude de pendu, ce qui n’était pas moins dangereux que désagréable. Aussi, dès que je