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Page:Reid - Aventures de terre et de mer, Hetzel, 1891.djvu/780

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quelques instants d’inexprimable confusion, que quelques survivants, parmi lesquels le Zopilote, purent se rejeter dans la plaine, pour y tomber au milieu du cercle de fer formé par les troupes victorieuses du colonel Requeñes.

Alors, voyant toute résistance impossible, le Zopilote, grièvement atteint au bras droit par un fragment de roche, et les hommes qui lui restaient jetèrent bas leurs armes. Tous, immobiles et la tête inclinée sur la poitrine, attendirent qu’on décidât de leur sort.

À ce moment même, le jour se levait, éclairant de tous ses feux cette scène de carnage.

Dans la plaine, entre la montagne et les Mexicains dont les escadrons s’étaient rejoints et formés en demi-cercle infranchissable, de nombreux cadavres de Coyoteros étaient étendus sur le sol, et plus loin, leur campement, détruit par l’artillerie, présentait un aspect lamentable.

Cette aurore fut saluée par des acclamations de joie frénétiques, partant du plateau et répétées par les prisonniers du Zopilote, que les cavaliers du colonel Requeñes avaient, par grand bonheur, dans une si effroyable mêlée, pu reconnaître à temps et faire passer derrière le camp.

Des sept cents hommes du Zopilote, deux cent cinquante à peine survivaient à la bataille. Les vainqueurs commencèrent par s’assurer d’eux en leur attachant les bras derrière le dos et en les réunissant deux par deux, et ils furent confiés à la garde des peones.

Quand cette besogne fut accomplie, quand le ravin fut débarrassé des cadavres qui l’encombraient, les assiégés descendirent.

Il serait impossible de décrire, dans ce qu’elles eurent de touchant, les scènes d’effusion qui suivirent, entre ceux qui avaient craint de ne jamais se revoir, et principalement entre Robert Tresillian et son fils, puis entre celui-ci et Gertrudès, dont le visage pâli rayonnait cependant de bonheur, dans ce moment d’allégresse qui succédait à tant d’heures de désespoir.


CHAPITRE XXII
SANTA-GERTRUDÈS


Lorsque les mineurs rentrèrent au camp abandonné par eux depuis de si longs jours, ils furent agréablement surpris d’y retrouver presque toutes choses en état.

Les chariots, les machines, les outils, tout était intact ou à peu près. Les Coyoteros n’avaient même pas pris la peine de détruire ces objets pour eux inutiles.

C’était une fortune inespérée que cet immense matériel de mineurs, dont les sauvages n’avaient évidemment pas apprécié la valeur.

Quant aux chevaux et aux mules, ceux qu’on venait de leur reprendre compensaient la perte de ceux qu’on avait été forcé d’abandonner lors de la surprise.

Deux jours après la délivrance, tout était réparé, ou peu s’en fallait. On avait enterré les morts, et tandis que le colonel Requeñes regagnait Arispe, emmenant avec lui les Apaches prisonniers, sur le sort desquels il serait statué plus tard, don Juliano, avec ses peones, reconduisit dans leur village de Nacomori les femmes, les enfants et les quelques hommes si miraculeusement délivrés.

La sécurité était maintenant complète. Peut-être même, en s’y prenant bien, ne serait-il pas impossible de se faire un allié du Zopilote. Blessé, comme on l’a vu (il l’avait été de telle façon que l’amputation avait dû être faite sur-le-champ), devenu impropre à