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LE CHEVAL SAUVAGE.

Tout à coup, mon regard se cloua sur une piste fraîche dans l’herbe. Je reconnus aussitôt que c’était celle d’un cheval, et cette conviction me fit immédiatement recouvrer la raison et le calme. Si le Cheval blanc avait été réellement un fantôme, pourquoi donc aurait-il laissé cette trace derrière lui ? Un moment de réflexion me suffit pour me décider à suivre la piste. Je ramassai la bride que j’avais abandonnée et je repris ma marche, sans quitter des yeux les empreintes marquées dans le sol par les sabots du mustang. J’avais fait environ deux cents pas lorsque brusquement ma jument s’arrêta court. Je me penchai en avant pour tâcher de découvrir la cause de cette halte inopinée et je poussai une exclamation qui attestait que le charme était rompu.

Devant moi, à trente pas environ d’éloignement, se dessinait sur la prairie une ligne sombre coupant en biais le chemin que je suivais. C’était, en apparence, une étroite et longue excavation semblable à un ravin ; mais, en me rapprochant, je découvris un creux large et profond, une de ces fondrières connues dans l’Amérique espagnole sous le nom de barrancas. Le sol était béant comme à la suite d’un déchirement produit par un tremblement de terre, quoique, suivant toute vraisemblance, il n’eût été raviné de la sorte que par quelque torrent subit. La racine que j’avais sous les yeux était partout également large. Son lit était couvert d’énormes blocs de rocher, ses parois escarpées et tout à fait verticales. Du côté droit, il était relativement peu en contre-bas et la pente cessait indubitablement à proximité de l’endroit où je me trouvais. Du côté gauche, au contraire, il allait s’approfondissant, à mesure qu’on avançait.

La disparition du Cheval blanc n’était donc plus un