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LE CHEVAL SAUVAGE.

peine étaient-ils partis qu’un éclair projeta sa vive lumière sur la prairie. La peau de daim n’était plus là : notre camarade avait donc pu se dérober heureusement.

Pour la première fois depuis que nous avions rencontré les Mexicains, nous respirâmes librement ; et, le cœur léger, nous retournâmes à l’endroit où nous étions montés sur le plateau. Tant que j’avais pu craindre que ma dernière heure ne fût arrivée, le sort de ma jument et du Cheval blanc n’avait eu, je l’avoue, qu’une part très accessoire dans mes préoccupations. L’homme est ainsi fait que lorsqu’il est en danger de mort, il ne songe plus qu’à sa conservation personnelle. Mais maintenant que j’avais la conviction de survivre à cette périlleuse aventure, l’égoïsme faisait place à des sentiments plus généreux, et je souhaitais ardemment de conserver non seulement ma propre monture, mais aussi l’excellent et beau mustang, qui avait été pour moi la cause de tant d’anxiété.

Cependant les éclairs étaient devenus moins intenses et ne se succédaient plus qu’à des intervalles éloignés. Ce fut dans un de ces intervalles de calme que nous entendîmes à quelque distance des pas de chevaux. Il y a une différence très sensible entre le pas d’un cheval qui porte un cavalier, et celui d’un cheval qui n’a pas cette charge. L’habitant des prairies ne s’y trompe que fort rarement. Mon compagnon m’assura que les chevaux dont nous entendions l’approche étaient montés.

Nos ennemis mexicains avaient dû les entendre comme nous : deux d’entre eux partirent au galop pour opérer la reconnaissance ; nous pûmes nous en rendre compte par l’ouïe, car l’obscurité était trop grande pour nous permettre de voir à plus de trois yards devant nous. Nous ne restâmes pas longtemps