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histoire de la révolution russe

avec un correspondant d’un journal anglais (23 avril), Kerensky a formellement nié que les socialistes russes souhaitassent la paix à tout prix. Il fit remarquer que les demandes de paix séparée avaient été bien plus nombreuses sous l’ancien régime que depuis la Révolution ; seulement, sous Nicolas II, les démarches pacifistes des pro-germains de haut parage étaient tenues soigneusement cachées, tandis que la presse recueillait les moindres propos de ce genre quand ils étaient tenus par des ouvriers. « Les socialistes, dit Kerensky, feront une guerre défensive ; ils ne veulent pas d’annexions, mais sont résolus à ne pas faire d’avances en vue de la paix. » Kerensky a même admis le principe des réparations, spécialement pour la Pologne et la Belgique, mais il repousse « toute exaction dans quelque but que ce soit », sans trop définir ce qu’il entend par ces mots.

Le Comité de Tauride n’est pas formé que de délégués ouvriers, plus ou moins imbus d’idées marxistes ; il comprend aussi des délégués militaires, pour la plupart paysans, qui sont moins faciles à égarer. Un antagonisme, d’ailleurs salutaire, s’est manifesté de bonne heure entre les deux éléments du Comité ; la prédominance du second, également certain dans la future Constituante, mettra toujours un frein aux velléités des extrémistes. Le rôle prépondérant qui incombe aux États-Unis dans la dernière phase de la guerre est un autre élément qui assurerait, si la ferme volonté du Gouvernement russe n’y suffisait point (déclaration du 1er mai), la fidélité de la Russie libre et loyale à ses engagements internationaux.