Page:Reinaud - Mémoire sur le Périple de la mer Érythrée.djvu/52

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Limyrice. Ici l’expression manque de justesse ; mais c’est la première et la dernière fois que cela arrive à l’auteur pour les régions qu’il a visitées lui-même. D’ailleurs on peut faire observer que ce qui n’avait pas été fait par Alexandre fut fait après lui par son lieutenant, Seleucus Nicator[1], et par les rois grecs de la Bactriane. Si, ici, l’auteur s’est fait l’écho des récits populaires, a-t-il fait autre chose que ce qui s’est fait en d’autres temps et en d’autres lieux ? Chez nous le nom de César est attaché à toute ruine dont l’origine n’est pas connue. Pour parler de choses plus modernes, combien de routes et de ponts qui ont été construits sous la restauration, et dont le peuple fait honneur à Napoléon 1er ?

Le Périple renferme une description très-détaillée de Barygaze et de ses environs. C’est peut-être le port de l’antiquité qui a été décrit avec le plus de soin tant au point de vue topographique qu’au point de vue commercial. Il faut croire que l’auteur y avait séjourné pendant quelque temps, ou qu’il y avait fait plusieurs voyages. Il parle des serpents qui peuplent les côtes du Guzarate et du Malabar. Comme le terrain est bas, et que, de la haute mer, le rivage n’est pas toujours facile à reconnaître, alors comme aujourd’hui, ces serpents servaient de signe aux navigateurs[2]. L’accès de Barygaze étant difficile par lui-même, des pilotes, entretenus par le gouvernement, allaient au-devant des navires et les guidaient au port.

Le commerce de Barygaze était immense, et il y arrivait des marchandises de tous les côtés. Par mer, on y voyait affluer des navires de la Mer Rouge, du golfe Persique, du golfe du Bengale et de la Malaisie, ainsi que les navires qui redescendaient l’Indus, alors comme à présent une des artères de la presqu’île.

  1. Pline, liv. VI, ch. XXI.
  2. Voyage de Niebakr, tome Ier de la traduction française, p. 360.