Page:Reiset - Mes souvenirs, tome 1.djvu/338

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
329
CHAPITRE ONZIÈME

ses agresseurs était mort. Le duc de Savoie avait été reconnu et on s’était plaint au roi. Il fallut donner à la famille du défunt une somme considérable pour l’apaiser et pour empêcher que cette affaire fit scandale. Victor-Emmanuel me dit que, depuis ce jour, il prenait de grandes précautions quand il sortait la nuit. « J’ai des ennemis, me dit-il, qui n’attendent qu’une occasion favorable pour m’attaquer, mais rien ne m’arrêtera ! »

Un moment après il manifesta l’intention d’aller voir le général Dabormida, habitant un quartier assez écarté dans la maison du libraire Pomba auprès du jardin public. Il ne faisait pas encore jour. Sous l’impression de ce qu’il venait de me raconter, je lui offris de l’accompagner. Je ne voulais pas le laisser exposé seul aux dangers d’une excursion nocturne à une époque de troubles comme celle dans laquelle nous vivions. Nous sortîmes donc ensemble. Arrivés devant la maison occupée par le général Dabormida, au bout de ma rue, nous fîmes retentir la porte d’un grand coup de marteau, puis d’un second, puis d’un troisième plus violent que les premiers qui décida enfin le concierge à sortir de sa loge. Nous l’entendîmes se diriger vers la porte en grommelant. Il nous demanda qui nous étions sur le ton le plus aigre, et, comme Victor-Emmanuel se