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CHAPITRE NEUVIÈME

Mme du Cayla présenta ce mariage au missionnaire comme un acte de la plus sublime charité chrétienne, un sacrifice accompli pour l’amour du prochain, l’engageant à en parler à Lucchesi comme d’un acte d’héroïque chevalerie dans le but de sauver l’honneur d’une femme qui était la sœur de son roi et qui n’avait sans doute succombé que malgré elle au milieu de sa vie aventureuse, bravant tout pour son pays. Cet ecclésiastique était un jeune homme enthousiaste, et Mme du Cayla était une femme aussi spirituelle qu’adroite. Bref, Lucchesi accepta. Mais à peine le oui prononcé et la lettre pour Blaye partie, il fut au désespoir. Il n’y avait plus moyen de reculer. Il fut entouré, persuadé de toutes manières. Néanmoins, plus le temps avançait, plus il avait horreur du sort qui l’attendait, d’autant plus qu’il apprit qu’on soupçonnait le comte de M…, homme déjà d’un certain âge, d’être le père de l’enfant qu’il devait reconnaître par son mariage. Chaque jour cette union lui devenait plus odieuse. Il exigea que du moins M. de M… quitterait le service de la duchesse, car il apprit ce qui confirmait ses soupçons que pendant le séjour de la duchesse en Vendée, son chevalier d’honneur couchait toujours, par mesure de sûreté, en travers de sa porte. Il fut fort mécontent quand il aperçut M. de M… à