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CHAPITRE NEUVIÈME

de Lombardie elle le suivait sur les champs de bataille habillée en homme. Elle a peu d’esprit naturel, aucune grâce dans sa personne, dans son maintien, dans sa voix. Toute sa beauté consiste dans des formes arrondies et bien proportionnées et dans une fraîcheur qui se conserve encore malgré ses trente-cinq ans. Sa figure est commune, mais pleine de vivacité. L’expression de son regard et de ses traits annonce beaucoup de résolution et de volonté. C’est sans doute à la force de son caractère qu’elle doit d’avoir pu prendre de l’empire sur le cœur du Roi et de le conserver à travers les nombreuses infidélités de son royal amant et malgré les efforts incessants de toute la cour pour le détacher d’elle. Avertie par le dédain général dont elle est l’objet qu’elle ne pourra jamais se faire accepter de la bonne compagnie, ni composer sa société de personnes bien nées, elle leur a voué une haine implacable. Elle ne néglige aucune occasion d’indisposer le Roi tantôt contre l’un, tantôt contre l’autre de ses meilleurs serviteurs. La défiance qu’elle sème autour de lui rétrécit de plus en plus le cercle dès personnes très honorables qui vivaient dans son intimité et le jette dans la société des gens sans nom et sans aveu qui entourent habituellement sa maîtresse. Cette femme se croit tellement sûre de son ascendant qu’à l’époque de la mort