Page:René Benjamin - Chronique d’un temps troublé, 1938.djvu/211

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
199
L’ÉDUCATION DES PARENTS

sur un ton prophétique, il commença par annoncer qu’il parlerait net — comme Mme Lherminat avait dit qu’elle regardait en face. Le christianisme, expliqua-t-il, est l’ennemi des fausses pudibonderies : ses textes le prouvent. Dans la plus pure des prières ne lit-on pas : « Jésus, fruit de vos entrailles ! » Les chrétiens parlent net.

Et la face rouge, les lèvres blanches, il se mit à accabler l’homme, « l’élément mâle », qui pour maintenir sa domination sur la femme, prétend ne pas pouvoir contenir le dynamisme de son sexe. Ah ! Ah !

Le rire du Pasteur Bleakok était à entendre. Il amena du rayonnement sur le visage des dames. J’avais avancé ma chaise : je le buvais littéralement.

— Ainsi, mesdames, clama le Pasteur Bleakok, le sexe le plus animal serait celui chargé par Dieu de l’autorité ! Oh ! Oh !

Le rire recommençait ; mais il s’étouffa dans la colère. Le Pasteur avec violence se mit à dénoncer un préjugé des familles, une folie des mères, des mères les plus chrétiennes : on en trouve, oui Mesdames, qui sont fières des prouesses amoureuses de leurs fils ! Et le bras tendu, il déclara : « Le mal, c’est la passivité des chrétiens ! » Vingt femmes se tournèrent vers leurs maris, qui ne bougèrent pas.