Aller au contenu

Page:René Benjamin - Chronique d’un temps troublé, 1938.djvu/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
85
LA FEMME ET LA MÉDECINE

— Cette force que je vous ai donnée, dit Balatour, en fin de séance, — il soupirait, comme un homme épuisé, – ne la dispersez pas, madame !… Ne recevez personne ce soir !… Revenez demain !

Le lendemain, les choses se gâtèrent. Balatour voulut lui envoyer des ondes sur la nuque. Elle sentit un vertige et s’évanouit presque.

— Je suis trop fort, dit-il, trop fort pour vous. Revenez après-demain, à la séance publique.

Il appelle ainsi une réunion de personnes entre qui il répartit ses ondes. Ma sœur se trouva au milieu de vieilles dames, qui fermaient les yeux pour se mieux concentrer, dès que cet homme mystérieux se mettait à leur dispenser des énergies. Certaines respiraient fort ; l’une d’elles souriait. Ma sœur, pour la première fois, n’éprouva rien.

Le plus surprenant, c’est qu’elle n’eut pas de surprise. Ce Balatour soudain lui apparaissait tel qu’il est, démoniaque avec un nom ridicule, et elle considérait ces créatures, abandonnées dans leur faiblesse à des espoirs puérils, hésitant elle-même entre la pitié, le mépris, l’amusement. Le spectacle des autres venait de l’éclairer sur soi : elle se voyait comme dans un miroir.

Elle partit désabusée, parmi des femmes