Page:René de Pont-Jest - Divorcée.djvu/146

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la princesse eût été déshonorée et son déshonneur eût rejailli sur moi et sur mon fils Alexandre. C’est ce que je ne voulais pas. Le nom des Olsdorf doit rester sans tache. Pour atteindre mon but, j’ai dû alors simuler une faute de nature à me rendre inexcusable, et c’est ta fille qui a été ma complice.

— Ma fille ! s’écria Alexeï, en se levant brusquement.

— Je t’ai prié de m’écouter avec calme et je te jure de nouveau sur l’honneur de la race, que Véra est toujours la vierge immaculée que tu m’as confiée.

Les yeux remplis de larmes, le paysan reprit sa place.

Pierre Olsdorf continua :

— Sans même se rendre compte du rôle qu’elle remplissait, ta fille m’obéit avec un tel dévouement, une telle naïveté, que le magistrat chargé de constater le flagrant délit de l’adultère dont je devais paraître coupable y fut trompé, ainsi que ma femme elle-même, qui l’accompagnait, comme le veut la loi. Grâce à Véra, je réussis complètement ; je me gardai bien de me défendre et ta fille ne fut pas même interrogée. Le divorce fut prononcé contre moi, mais on me laissa la garde de mes enfants ; je dis : de mes enfants, car la princesse avait mis au monde une fille que je ne pouvais renier sans accuser à mon tour celle que je voulais laisser respectable ; et Lise Olsdorf devient, par mon ordre, la femme légitime de l’homme avec lequel elle m’a trompé. Cette enfant, qui porte forcément mon nom, je l’ai ramenée avec moi et l’ai confiée à Véra. Voilà pourquoi celle-ci est restée à Pampeln, remplie de terreur à la pensée que, mal renseigné, tu pourrais la croire coupable et lui enlever ton affection.

— Ma fille bien-aimée ! gémit Soublaïeff ; oh ! qu’elle vienne, qu’elle accoure donc bien vite à Elva ! Je ne lui dirai jamais combien j’ai souffert de son absence et de votre récit. J’ignorais tout ce que vous venez de me dire et je vous crois comme si Dieu lui-même me parlait, mais si, moi, son père, je ne doute pas de sa pureté, les autres, ceux qui savent tout ce qui s’est passé là-bas, dans ce Paris maudit, croiront-ils encore que Véra Sou-