Page:René de Pont-Jest - Divorcée.djvu/162

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pas voulu nous humilier, c’est une folle, et Paul n’a guère plus de raison. Mais nous, nous ne manquerons jamais de rien, tandis que, surtout si madame lui donne un enfant tous les ans, ton frère, avant peu, aura ce monde-là sur les bras et sera dans la misère !

— Ah ! diable ! tu vois les choses trop en noir, riposta Frantz avec une certaine fermeté. Comment peux-tu supposer que Lise a voulu nous humilier ? C’est absurde ! Je trouve, moi, que c’est une charmante femme ! Décidément, tu ne l’aimes pas ! Tu lui donneras les dîners que tu voudras ; je suis bien certain qu’elle ne verra que notre bonne volonté à la recevoir.

Pour en finir sur ce sujet, car il ne se sentait pas d’humeur à céder, le musicien se fit arrêter à l’Opéra sous le prétexte d’une communication qu’il avait à faire à un artiste à propos d’un concert, et il laissa Barbe rentrer seule, circonstance qui ne fut pas de nature à la calmer.

Aussi, quelques jours plus tard, quand ce fut son tour de recevoir Mme Paul Meyrin, Mme Frantz affecta-t-elle de le faire avec la plus grande simplicité, ce dont Lise ne s’aperçut même pas, heureuse qu’elle était de rentrer dans cette maison, théâtre des premiers temps de ses amours.

Lorsque, d’un ton aigre-doux, sa belle-sœur lui dit :

— Ah ! dame ! ce n’est pas ici aussi luxueux que chez vous et mon argenterie est tout simplement du ruolz :

Elle lui répondit avec son franc et bon sourire :

— Qu’importe ! Nous allons peut-être dîner bien mieux que chez moi. Ce que je voulais, c’est votre affection. Je l’ai retrouvée, cela me suffit.

Et prenant Nadèje sur ses genoux, elle lui passa au cou, en l’embrassant, un délicieux collier de perles qu’elle avait porté dans sa jeunesse, ce dont la fillette la remercia par mille caresses et des cris de joie.

Au même instant, on annonça M. Armand Dumesnil.

Sachant que Mme Paul venait dîner ce soir-là rue de Douai, le vieux comédien s’était fait inviter. Lise, qui avait appris par Mme Daubrel avec quelle chaleur il avait toujours plaidé sa cause, lui tendit avec un affec-