Page:René de Pont-Jest - Divorcée.djvu/182

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vrait ses lèvres sensuelles ; ses grands yeux, aux paupières légèrement estompées, lançaient des regards pleins de luxurieuses promesses.

Le peintre, émerveillé, laissait là souvent le pinceau pour admirer le modèle, puis il se remettait fiévreusement au travail.

Tout à coup, Sarah se redressa en s’écriant :

— Paul, ta femme !

La porte de l’atelier venait de s’ouvrir ; Mme Meyrin avait apparu sur le seuil.

Son mari, qui s’était retourné, devint d’une pâleur livide.

Sans même jeter un regard sur son mari, Lise s’avança jusqu’au divan où se trouvaient pêle-mêle les vêtements de Sarah et, les poussant du pied de son côté, elle lui dit avec un geste de mépris :

— Habillez-vous et sortez !

— Madame, répondit la juive, d’un ton de révolte et en se drapant de son mieux dans l’une des étoffes lamées d’or qui ornait le lit de la reine d’Égypte, je ne suis pas ici chez vous.

— Le domicile de M. Meyrin est celui de sa femme légitime, qui en chasse sa maîtresse. Sortez, vous dis-je, ou je vous tue.

Elle avait tiré de son corsage le revolver dont elle s’était emparée dans l’atelier rue d’Assas, et mettait en joue la jeune fille, qui se rejeta en arrière en poussant un cri d’épouvante. Le calme de Mme Meyrin était effrayant.

Revenu à lui, Paul épouvanté s’élança vers elle pour mettre fin à cette scène horrible. Elle ne lui permit pas de prononcer un seul mot.

— Monsieur, lui dit-elle froidement, en dirigeant son arme vers lui, un article du Code français excuse, à ce qu’il paraît le meurtre, par le mari, de l’épouse surprise en flagrant délit d’adultère ; peut-être excuserait-il également, dans le même cas, le meurtre de l’époux par sa femme légitime. Je vous défends de m’adresser la parole avant que cette fille soit partie.

Le Roumain n’était point un lâche : néanmoins il s’ar-