Page:René de Pont-Jest - Divorcée.djvu/223

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ses douleurs ? Et cet homme qu’il avait épargné, comment était-il puni de sa conduite odieuse ? Pouvait-il admettre qu’il en fût plus longtemps ainsi ? Ce Paul Meyrin lui avait pris son honneur, sa femme, et, comme un misérable, il abandonnait le foyer conjugal où il aurait dû se sentir rivé par tant d’obligations. Et il vivait heureux, sans souci du mal qu’il avait fait ! Non, cela n’était pas possible !

Trois années auparavant, le prince l’avait condamné à mort s’il n’épousait pas la femme qui s’était abaissée jusqu’à lui ; en cessant d’être le protecteur légal de cette femme, en oubliant tous ses devoirs envers elle, il redevenait justiciable de l’époux outragé jadis. C’était à lui, Pierre Olsdorf, qu’il appartenait de venger celle qui expiait si cruellement sa faute.

Ce que le prince ne se disait pas, ce qu’il ne voulait point s’avouer à lui-même, c’est que si ces tristes événements l’autorisaient à faire cesser son exil, il n’était pas moins rappelé en Europe par toutes les aspirations de son cœur que par le sentiment du rôle qu’il voulait y remplir. Maintenant, c’était Paul Meyrin qu’il accusait de tout ce dont il souffrait depuis trois ans. C’est lui seul qui avait fait couler des yeux de Véra tant de larmes ; c’est lui seul qu’il haïssait ; c’est lui qu’il voulait châtier !

Aussi résolut-il de partir le plus rapidement possible, et lorsque Yvan, envoyé aux renseignements, lui eut appris que l’un des steamers faisant un service régulier entre Bombay et Brindisi devait appareiller le lendemain, il y retint une cabine. Puis il adressa à Mme Daubrel la dépêche suivante :

« Je serai à Paris dans vingt à vingt-cinq jours au plus tard. Selon que vous le jugerez convenable, informez-en la malade et tâchez de lui rendre un peu de courage. J’envoie des ordres en Russie pour que l’arrivée de ses enfants coïncide. Donnez-moi des nouvelles à Rome, hôtel de la Minerve. »

Ensuite, également par télégramme, il pria Véra d’être prête à se rendre à Paris à son premier avis, avec Alexandre et Tekla. Elle devait descendre au Grand-