Page:René de Pont-Jest - Divorcée.djvu/234

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dement d’injures contre le gentilhomme russe et contre celle qui avait porté son nom.

Sarah aimait Paul comme un maître aime son esclave, comme une femelle aime un mâle, soit ! mais enfin elle l’aimait avec sa nature violente et passionnée ; de plus, elle était jalouse du passé, et comme son ignorance des choses de l’honneur ne lui permettait pas de supposer que Pierre Olsdorf voulût venger l’outrage qui lui avait été fait quatre années auparavant, elle interpréta sa provocation dans un tout autre sens. Ou le prince, épris de nouveau de sa femme, voulait tuer son mari pour la reprendre, ou son duel avec M. Meyrin n’était qu’un moyen d’intimidation pour le contraindre à retourner auprès de la délaissée.

— Tu le vois, s’écria-t-elle, lorsque son amant lui eut exposé la situation, tous ces gens sont contre toi. Après t’avoir forcé à épouser sa femme pour s’en débarrasser, voilà le prince qui vient te demander raison. Raison de quoi ? Je ne suppose pas qu’il ait le droit de contrôler ta conduite d’aujourd’hui. Tu es bien libre de vivre comme cela te convient ; les affaires de ton ménage ne le regardent pas. Vrai, ce serait trop drôle ! Une femme divorcée qui appelle son premier mari à son secours ! Ou alors, il veut se battre avec toi parce que tu l’as… trompé jadis. Ce serait encore plus fort ! Il a pris le temps de réfléchir et cette idée, sois-en certain, ne lui est pas venue sans qu’on le pousse un peu ! Eh bien ! moi, à ta place, j’enverrais ce cosaque-là se promener dans ses domaines. C’est tout simplement ton ancienne princesse qui a manigancé cette comédie là. Si tu te bats, tu ne seras qu’un imbécile !

— Je ne puis faire autrement, répondit Paul, quand Sarah voulut bien lui laisser la parole : Pierre Olsdorf dirait partout que j’ai eu peur de lui.

— Et après ?

— Après ! Tu ne réfléchis pas que si je refuse de me battre, d’abord mes amis me traiteront de lâche et je deviendrai la fable de tous les ateliers de Paris ; de plus, mes clients étrangers, russes pour la plupart, s’éloigneront de moi. Du reste, j’ai une dent contre ce prince