Page:René de Pont-Jest - Divorcée.djvu/41

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la sorte. Paul la contemplait avec admiration. Jamais il ne l’avait vue plus belle, plus désirable !

— Vous ne répondez rien, reprit-elle ; je ne me trompe donc pas !

— Oh ! si, vous vous trompez, madame, vous vous trompez entièrement. Oui, certes, je vous aime follement, cela est vrai, mais cet amour est une de ces passions fiévreuses qui naissent aux seuls cœurs des artistes amants du beau. Il est en moi un concert de toutes les sensations. Vous n’êtes pas seulement, pour l’homme épris, la femme désirée ; vous êtes aussi, pour le peintre, le modèle rêvé, la merveille de grâce et de beauté qui l’inspirera. Vous n’êtes pas seulement la femme qui dit : Amour ; vous êtes aussi l’idéal qui dit : Gloire ! Est-ce que s’il en était autrement, j’aurais eu l’audace de vous suivre ; j’aurais celle de vous parler comme je le fais, de vous prendre la main et de vous répéter avec mon âme, je vous aime ; je vous en conjure, aimez-moi !

Il avait saisi ses mains et les couvrait de baisers.

Il se passa alors une chose étrange, mais fatale entre ces deux êtres que tout attirait l’un vers l’autre !

Après avoir d’abord arraché brusquement ses mains de celles de son hôte, Lise Olsdorf, qui avait fait un pas en arrière, pâlit tout à coup et chancela. Ses yeux se remplirent d’éclairs, ses lèvres s’entrouvrirent, une sorte de cri guttural, passionné, presque sauvage, s’en échappa, et elle tomba dans les bras de celui qui s’était rapproché d’elle pour la soutenir.

Avec un mouvement de fauve, Paul la pressa contre sa poitrine, à la briser, ses lèvres rivées aux siennes.

Il n’y avait plus sous l’ombre épaisse des grandes allées de Pampeln ni épouse irréprochable, ni princesse Olsdorf si fière de son nom : il n’y restait qu’une femme qui se donnait, domptée par le désir jusqu’alors inassouvi.

L’autre était vainqueur ; la bête tuait l’âme !