Page:René de Pont-Jest - Divorcée.djvu/60

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taient adressées, cette correspondance, loin de les calmer, avait au contraire aiguisé leur passion.

Deux ou trois fois, il est vrai, la princesse avait usé de la complaisance de quelques-uns de ses amis pour leur confier des lettres dans lesquelles elle avait pu s’épancher à son aise, mais il n’avait pas été possible à Paul de lui répondre par la même voie, et Lise, plus privée encore que son amant, s’était souvent demandé avec une inquiétude fiévreuse si elle était toujours follement aimée.

Il est certain qu’elle en eût douté un peu si elle avait connu, dans ses moindres détails, l’existence que le peintre menait à Paris. En effet, tout en adorant la princesse, le beau Roumain n’en avait pas moins repris sa vie d’autrefois, et il ne s’était pas cru infidèle à ses amours en renouant à son retour les relations faciles qu’il avait eues avant son départ pour la Russie.

Au nombre des anciennes amies du jeune homme, il en était une qui avait joué près de lui un rôle plus important que les autres. C’était Sarah Lamber, fort jolie fille, figurante dans les théâtres de féeries et modèle très apprécié dans les ateliers. Après avoir posé une demi douzaine de fois devant lui, Sarah était devenue fort éprise de Paul, qui en avait fait sa maîtresse, supposant qu’il en serait d’elle comme de celles qui l’avaient précédée, c’est-à-dire qu’il s’en débarrasserait aisément, du soir au lendemain.

Il s’était trompé. Sarah, belle fille bohème, comme il s’en trouve tant à Paris, malgré la transformation qui s’est produite depuis quelques années dans les mœurs du monde interlope, Sarah, disons-nous, se souciait peu de ne manquer de rien. Ce qu’elle voulait, pour la première fois peut-être, c’était d’être aimée comme elle aimait, et grâce à la faiblesse du caractère de Paul Meyrin elle s’était si bien imposée à lui qu’il avait dû lui échapper furtivement lorsqu’il était parti.

De Saint-Pétersbourg, le peintre avait écrit à sa maîtresse pour lui expliquer les motifs de son voyage, et comme il ne prévoyait pas qu’il allait être le héros de l’aventure que connaissent nos lecteurs, il n’avait pas