Page:René de Pont-Jest - La Bâtarde.djvu/105

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Ce fut elle qui, sur le conseil de M. de Martry, décida sa mère à partir. Le commandant voyait dans cette longue absence la fin d’une liaison funeste.

Madame Berthier, que son protecteur avait quittée depuis plus d’un an, et qui, d’ailleurs, obéissait aveuglément à sa fille, ne fit aucune objection. Quant à Richard, il n’apprit ce départ subit et ses causes que par un mot assez sec de Gabrielle, alors que la fugitive était déjà en plein Océan.

Le malheureux faillit mourir de cet abandon ; pendant des semaines entières, M. de Martry craignit pour sa raison ; puis la jeunesse fut plus forte que la douleur, et le peintre revint à la santé, mais brisé, meurtri, n’ayant plus d’énergie que pour maudire celle qu’il affirmait ne plus aimer et dont le nom seul le faisait toujours tressaillir.

Le portrait de l’infidèle était dans le coin le plus sombre de l’atelier, couvert d’un voile noir. Richard n’osait y jeter les yeux.

Cependant, au bout de quelques mois, le pauvre fou devint plus calme, le désespoir fit en lui place à la résignation ; et M. de Martry venait de constater avec joie que son jeune ami reprenait peu à peu le goût du travail, lorsqu’il reçut du