Page:René de Pont-Jest - La Bâtarde.djvu/255

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Ainsi qu’avant son départ pour la Russie, Gabrielle ne recevait que des hommes, tous du meilleur monde, sauf quelques artistes dont le talent et la réputation étaient les quartiers de noblesse et excusaient, chez quelques-uns, le manque de distinction. On rencontrait chez mademoiselle Berthier la plupart des illustrations parisiennes, et il était certain qu’elle allait avoir très rapidement un cercle des plus intéressants.

Richard, dont les premiers jours de sa réunion avec sa maîtresse avaient été un incessant délire, prenait bien un peu d’ombrage de ces réceptions pendant lesquelles mademoiselle Berthier n’était plus qu’à ses courtisans, et il hasardait çà et là quelques observations, mais Gabrielle lui disait alors avec un charme infini :

— Cher fou ! laisse-moi au moins ces satisfactions d’amour-propre et sois sans souci, puisque je t’aime et ne veux aimer que toi. D’ailleurs, n’allons-nous pas partir, n’allons-nous pas vivre seuls, tous les deux, pendant des mois entiers !

Et le malheureux, enivré du présent, plein de confiance dans l’avenir, s’efforçait d’oublier les années de torture que lui avait infligées cette femme qu’il adorait toujours, mais avec des intermittences de remords et de colère.