Page:René de Pont-Jest - La Bâtarde.djvu/35

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Personne, d’ailleurs, n’était mieux fait que le jeune créole pour devenir passionnément épris.

Sa nature primesautière, naïve, franche et loyale ne pouvait supposer le mal, ne connaissait pas le mensonge, et les dames Berthier ne furent bientôt pour Paul que les victimes intéressantes d’un complot de famille.

Dès ce jour-là, il fut tout à leur dévotion, il le leur dit, et lorsque, de confidence en confidence, la jeune fille arriva à lui apprendre que sa mère avait refusé cinquante mille francs que Me Duchemin lui avait offerts au nom des héritiers de M. Morin, ses sentiments s’augmentèrent encore d’une admiration réelle pour un aussi noble désintéressement, pour un orgueil si légitime.

Une fois sur cette pente dangereuse, Paul s’y laissa glisser en fermant les yeux. Bientôt il sentit qu’il aimait follement Gabrielle, et celle-ci, devinant qu’elle avait atteint son but, redoubla de réserve, selon la manœuvre féminine d’usage en semblable circonstance.

La jeune fille affecta dès ce moment de ne plus rester seule avec Paul, comme cela lui était arrivé parfois dans la première quinzaine de la traversée.

Quand elle voyait M. du Longpré se diriger du côté où elle se trouvait isolée, soit sur l’arrière de