Page:René de Pont-Jest - La Bâtarde.djvu/60

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Je ne vous comprends pas ! N’êtes-vous pas libre ? Aimez-vous donc quelqu’un ?

— Non, je vous le jure !

— Alors ?

— Oh ! je vous en supplie, mon ami, ne m’en demandez pas davantage ; chacune de vos paroles est pour moi la plus atroce des tortures. Si vous m’aimez, ne me parlez plus de votre amour ; ne tâchez plus de surprendre le secret qui brûle mes lèvres, car s’il m’échappait, aussi vrai que nous sommes ici sous le regard de Dieu, je demanderais à l’abîme qui nous environne d’ensevelir mon désespoir.

En disant ces dernières paroles avec une exaltation croissante, Gabrielle était plus belle que jamais, non plus de cette beauté orgueilleuse et sévère qui avait frappé Me Duchemin et M. du Longpré lui-même, à Bourbon, mais d’une beauté plus chaste, plus touchante. On eût dit la statue de la douleur !

Paul s’était agenouillé devant elle.

— Non, Gabrielle, lui disait-il, en la forçant doucement à se découvrir le visage qu’elle voilait de ses mains, non, je ne vous demanderai rien, rien que d’accepter ma tendresse, mon dévouement, de me laisser vous aimer. Gardez votre