Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/279

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encore propres à la destruction et du plus effrayant aspect.

Je me décidai pour un kris long comme le bras, dont la lame bleue et damassée par le poison décrivait mille zig-zags sinistres en s’arrêtant sur une poignée recourbée en bois d’ébène représentant assez bien une tête de tigre, et pour un petit badi triangulaire portant sur chacune de ses faces une incision profonde destinée à laisser couler le sang sans aucun doute. Je payai le tout six piastres. L’honnête armurier, un Malais des plus hideux, me volait bien la moitié de cette somme, mais j’avais eu la maladresse de laisser percer mon faible pour les deux armes en question ; je n’avais plus qu’à payer. J’enfonçai avec le plus grand soin le kris dans son fourreau de bambou où venait même s’emboîter la garde tranchante dans sa partie inférieure, je glissai le badi à ma ceinture, et] ainsi armé, je suivis sir John insensible aux offres les plus séduisantes du vieux marchand.

Il nous restait à rendre notre visite aux fumeurs d’opium. Les autres cases qui, ainsi que je l’ai dit plus haut, faisaient un angle droit avec les kadei d’armes en longeant un des côtés de la halle de ce singulier village, étaient toutes occupées par eux. Nous ne l’eussions pas su que notre curiosité, éveillée par le silence et le calme qui régnaient autour de ces douze ou quinze misérables huttes, nous eût conduits vers elles.