Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/282

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quatre murs branlants de la case, s’élevait une plate-forme ronde, de deux pieds de hauteur, ne laissant entre elle et les parois qu’un chemin étroit pour les serviteurs du lieu. Sur cette plate-forme se tenaient accroupis en cercle une dizaine de Malais dans un état complet d’abrutissement, et demi-nus, à cause de l’intolérable chaleur que faisait naître la réunion de tant d’hommes dans un aussi petit espace. Au centre de ce cercle, se dressait, assez semblable à un narguilé, une espèce de pipe surmontée d’un petit fourneau de cuivre, où, à chaque instant, un budak[1] plaçait des charbons allumés au-dessus du madat, tabac fin qui se mélange avec l’opium. Un seul tuyau était adapté à la partie inférieure de la pipe. Chacun des fumeurs, après avoir aspiré longuement, rarement plus d’une fois, la fumée épaisse qui faisait bouillonner l’eau de rose du réservoir, le passait à son voisin. Le bout d’ambre faisait ainsi le tour de l’assemblée sans qu’un mot fût échangé. Deux hommes seuls paraissaient vivre : le serviteur chargé de renouveler, presque pour chaque fumeur, la dose de madat, et un grand et solide Javanais dont les fonctions consistaient tout simplement à saisir le fumeur ivre, pour le jeter à la porte s’il était furieux, pour le coucher dans un coin, enveloppé dans son sarong[2], s’il était seulement endormi.

C’était un hideux spectacle que celui qu’offraient

  1. Jeune esclave.
  2. Pagne de coton blanc.