Page:René de Pont-Jest - Le Fire-Fly.djvu/406

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que nous commencions à rencontrer, ne pussent voir de quel affreux drame notre embarcation avait été le théâtre.

Je ne connais rien de navrant comme ces profondes douleurs des hommes d’énergie et de courage. On dirait qu’ils souffrent plus encore que les natures faibles, et que le malheur, voulant se venger de leur résistance, pèse sur eux d’un poids plus impitoyable. Sir John ne se souvenait pas de sa blessure, ne savait pas s’il avait échappé à un danger ; il ne voyait qu’une chose, la mort de son ami, le désespoir de la pauvre veuve, et des larmes, qu’il ne cherchait pas à cacher, s’échappaient silencieusement de ses yeux qui ne quittaient pas la tente.

J’évitai de lui adresser la parole. Dans un état de tristesse impossible à rendre, nous doublâmes la pointe Bernard, où commence la rade des Américains.

Dix minutes après, nous étions abord. Sir John envoya demander un médecin à un des navires en rade et donna des ordres pour l’appareillage. Nous ne devions attendre, pour descendre le fleuve, que M. Hope et le frère de la malheureuse victime des pirates.

Le major du Britannia ne vint à bord que pour nous affirmer ce dont nous étions trop certains. Le coup qu’avait reçu M. Lauters avait été si violent que la mort avait dû être instantanée. Quant à la pauvre jeune femme, elle était folle !