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Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/106

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de cuir bouilli et ornés de dessins multicolores ; enfin tout l’arsenal meurtrier des peuplades où la poudre ne parle pas encore, mais qui n’en sont que plus cruelles dans le carnage.

L’un des angles du vaste hall, qu’éclairaient de grandes baies garnies de rideaux mobiles, afin que le jour y fût distribué selon les besoins de l’artiste, formait un fumoir avec de larges et bas divans, une peau d’ours pour tapis, un piano d’Érard et un attirail complet à l’usage des consommateurs de la plante importée par Jean Nicot, depuis la simple pipe Gambier jusqu’au houka des Hindous, au narghilé des Turcs, au cadjan des Perses, au calumet des Peaux-Rouges.

Dans un autre angle se dressait la reproduction en marbre de « la Velléda » qui avait valu à Gilbert le grand prix de Rome.

Le troisième était une véritable salle d’armes, où le maître de la maison et ses amis, friands de la lame, s’escrimaient fréquemment ; et dans le dernier enfin, sous l’escalier Henri II menant à l’étage supérieur, un palanquin en bois de santal, incrusté de nacre et capitonné de soie, véritable nid d’amour, coquet comme une chaise à porteurs d’une duchesse de la cour de Louis XV, semblait attendre la brune fille de Vischnou qui s’en était peut-être servie jadis pour se rendre à la pagode, emportée par ses béras, vêtus de blanc.

Pour soigner toutes ses richesses et le servir, le créole n’avait que deux domestiques : Marthe, une