Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/150

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se tenait sur le palier, appuyée contre la rampe, l’oreille aux aguets, en proie à une indicible inquiétude, lorsqu’elle vit Éva paraître, semblable à un spectre dans son long peignoir blanc.

Elle courut à sa rencontre pour la soutenir, car elle paraissait prête à défaillir ; mais sa nièce, l’écartant de la main, lui montra ceux qu’elle précédait et, d’un pas assuré, se dirigea vers sa chambre, en disant au commissaire :

— Vous me permettrez bien de m’habiller ? Oh ! ne craignez pas que je m’échappe une seconde fois, puisque le seul moyen qu’il y ait pour moi de fuir mon père et mon mari est de vous suivre.

M. Garnier s’inclina, donna à son agent l’ordre de rester dehors et rentra dans l’appartement de Mme  Bertin pour y dresser le procès-verbal que le libraire exigeait plus que jamais. L’attitude et le ton méprisant de sa femme avaient transformé sa colère en véritable haine.

Quant à M. de Tiessant, devenu sombre, il gardait le silence.

Le fougueux publiciste pensait que ce scandale était son œuvre, qu’il retomberait en grande partie sur lui et que, pour avoir poussé à la violence le mari de sa fille, il avait conduit celle-ci à préférer un procès en adultère, c’est-à-dire le déshonneur public, à sa rentrée sous un joug qui devait lui sembler plus lourd que jamais.

Peut-être avait-il aussi la conviction, par orgueil et même par respect pour Éva, que, malgré les appa-