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XV

Maison centrale ou exil.



Le père Jean, qui continuait à se tenir aux aguets, s’était trouvé là au moment de l’arrivée de Raoul et avait appris immédiatement la mort de M. de Ferney.

Sans perdre une minute, il était allé en informer Françoise, qui s’était fait conduire de suite à l’hôtel Molière.

— Enfin ! s’écria Jeanne, dès que sa sœur lui eut tout dit. Ah ! peu m’importe qu’il ait vu son fils ; maintenant, je ne partirai pas. Quel malheur que ton ami Pergous ne soit pas à Paris !

— Pourquoi ? demanda la Manouret.

— Parce que j’ai besoin d’un conseil.

— Veux-tu que je lui écrive !

— Je n’ai pas le temps d’attendre ; je m’adresserai ailleurs. Demain, ne sors pas de chez toi ; j’irai probablement te voir. Tiens, donne ça de ma part à ton commissionnaire.

En disant ces mots, Jeanne mit deux louis dans la main de Françoise qui se retira.

Le lendemain, vers dix heures du matin, vêtu de noir et plus belle que jamais dans sa toilette de deuil, Mme de Ferney se faisait annoncer, sous le nom de Jeanne Reboul, chez Me Desjardins, un des avoués les plus honorables et les plus experts de Paris.

Elle était certaine que cet officier ministériel ne la connaissait pas de vue, et elle était également convaincue que si la nouvelle de la mort de M. de Ferney était déjà arrivée jusqu’à lui, il ignorait du moins les scènes dont l’hôtel avait été le théâtre.

Me Desjardins s’empressa de la recevoir.

— Monsieur, dit-elle, en prenant place dans le fauteuil que l’avoué lui avait offert, je viens vous demander un avis important.

— Je vous écoute, madame, répondit Me Desjardins.

— À la suite d’une scène violente avec son mari, une femme de mes amies a quitté le domicile conjugal, et, quarante-huit heures après son départ, son mari est mort, victime d’un accident. Quels sont, les droits de cette femme ? A-t-elle celui de rentrer dans ce domicile ?