Page:René de Pont-Jest - Sang-Maudit.djvu/423

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— Il faudrait encore savoir où elles sont, ces fameuses lettres. On ne peut pas fouiller la maison de maître Pétrus de la cave au grenier.

— C’est vrai.

— Donnez-moi d’abord ce renseignement ; j’ai votre homme.

En bonne parente, la marchande à la toilette venait de penser à son frère ou à son neveu.

— Je tâcherai de m’informer, reprit Sarah, mais ce n’est pas tout.

— Ah ! voyons le reste ! demanda l’aînée des Méral en souriant.

— J’ai intérêt, à savoir ce que fait un de mes amis, M. de Fressantel, que vous connaissez, je crois.

— Gaston de Fressantel ? C’était un de mes clients avant la guerre.

— Dans ce moment, il est sans le sou ; seulement il a une jeune tante qui est veuve, a cent mille livres de rente et qu’il voudrait bien épouser.

— Je le comprends, ça le referait joliment. Vous n’allez pas l’en empêcher, au moins ?

— Du tout, mais je voudrais avoir près de lui quelqu’un à moi pour me tenir au courant de ses faits et gestes.

— Pour le coup, j’ai votre affaire.

Cette fois, c’était exclusivement à son neveu que la sœur de Jeanne venait de songer.

— Alors, je puis compter sur vous ? fit Sarah en se levant.

— Absolument, répondit la Fismoise. Envoyez-moi à propos de la correspondance de la générale les renseignements dont j’ai besoin, je trouverai votre homme, et demain matin, vous recevrez la visite d’un mien parent auquel vous pourrez confier en toute sûreté M. de Fressantel. Vous demeurez toujours rue de la Pépinière ?

— Oui, no 46. Alors, à demain ?

— À demain !

Après avoir rabattu son voile sur son visage, Sarah se glissa par la porte entrebâillée et sauta dans son coupé dont le cheval partit aussitôt.

En se retournant, après avoir barricadé son magasin, Françoise aperçut ses deux hôtes forcés. Devenus les meilleurs amis du monde, ils avaient quitté la pièce du fond pour la rejoindre.

Inutile de dire qu’ils avaient tout entendu, ce dont la brocanteuse était d’ailleurs parfaitement convaincue.

— Eh bien ! leur dit-elle, en les repoussant doucement dans l’arrière-boutique,