Page:Renan - Ecclesiaste - Arlea.djvu/75

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plus conformes au véritable esprit philologique, au risque de ne pas arriver à se satisfaire entièrement.

Les Hébreux, depuis une époque fort reculée, eurent l’habitude de jouer sur les noms propres et d’appliquer de bizarres combinaisons, dont les principales sont l’albam et l’atbasch. Toutes deux consistent à diviser les vingt-deux lettres en deux registres, qu’on fait coïncider, ou en les juxtaposant, ou en les rabattant l’un sur l’autre comme au moyen d’une charnière. Dans le premier système, la première lettre {l’aleph) s’échange contre la douzième (le lamed), la deuxième lettre (le bet) s’échange contre la treizième (le mem). Dans le second système, la première lettre (l’aleph) s’échange contre la dernière (le tav), la seconde lettre (le bei) s’échange contre la pénultième (le schin), et ainsi de suite. On a déjà des exemples de ces jeux de lettres dans Jérémie, c’est-à-dire environ six cents ans avant Jésus-Christ. Ainsi, par le procédé de l’atbasch, le nom de Babel (BBL) devient SSK, le nom de Casdim (KSDIM) devient LBQMI (Jér., xxv, 26 ; Li, 1, 41)[1]. Poussant le jeu plus loin encore, on mettait des voyelles aux lettres ainsi groupées ; on lisait Sésaq, Leb qamai, et on cherchait un sens aux syllabes ainsi obtenues par le hasard, absolument comme si, en français, on formait avec les lettres si connues S. G. D. G. un mot sagidog ou sugidag, dont on donnerait l’explication par les règles ordinaires de l’étymologie.

Le nom de QHLT ayant juste quatre lettres comme

  1. C’est à tort que l’on a voulu considérer ces formes bizarres comme une altération du texte ancien. Cf. Graf, Der Prophet Jeremia.