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Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/153

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hasidim ou gens pieux. On n’était ni schismatique ni hérétique pour s’affilier à eux[1], pas plus qu’on ne cesse d’être protestant pour être disciple de Spener, ou catholique pour être de l’ordre de Saint-François ou de Saint-Bruno. Le peuple les aimait à cause de leur piété, de leur simplicité, de leur douceur[2]. Les aristocrates du temple les voyaient sans doute avec déplaisir. Mais la secte faisait peu d’éclats ; elle était tranquille, grâce à son obscurité.

Le soir, les frères rentraient à leur quartier et prenaient le repas, divisés par groupes[3], en signe de fraternité et en souvenir de Jésus, qu’ils voyaient toujours présent au milieu d’eux. Le chef de table rompait le pain, bénissait la coupe[4], et les faisait circuler comme un symbole d’union en Jésus. L’acte le plus vulgaire de la vie devenait ainsi le plus auguste et le plus saint. Ces repas en famille, toujours aimés des Juifs[5], étaient accompagnés de prières, d’élans pieux, et remplis d’une douce gaieté. On se croyait encore au temps où Jésus les animait de sa présence ; on s’imaginait le

  1. Jacques, par exemple, resta toute sa vie un juif pur.
  2. Act., ii, 47 ; iv, 33 ; v, 13, 26.
  3. Ibid., ii, 46.
  4. I Cor., x, 16 ; Justin, Apol I, 65-67.
  5. Συνδεῖπνα. Joseph., Antiq., XIV, x, 8, 12.