Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/307

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La prononciation vulgaire, en effet, était chrestiani[1].

Les Juifs, en tout cas, n’adoptèrent pas, au moins d’une façon suivie[2], le nom donné par les Romains à leurs coreligionnaires schismatiques. Ils continuèrent d’appeler les nouveaux sectaires « Nazaréens » ou « Nazoréens »[3], sans doute parce qu’ils avaient l’habitude d’appeler Jésus Han-nasri ou Han-nosri « le Nazaréen ». Ce nom a prévalu jusqu’à nos jours dans tout l’Orient[4].

C’est ici un moment très-important. L’heure où une création nouvelle reçoit son nom est solennelle ;

  1. Corpus inscr. gr., nos 2883 d, 3857 g, 3857 p, 3865 l ; Tertullien, Apol., 3 : Lactance, Divin Inst., IV, 7. Comp ; la forme française chrestien.
  2. Jac., ii, 7, n’implique qu’un usage momentané et incertain.
  3. Act., xxiv. 5 ; Tertullien. Adv. Marcionem, IV, 8.
  4. Nesârâ. Les noms de meschihoio en syriaque, mesihi en arabe, sont relativement modernes, et calqués sur χριστιανός. Le nom de « Galiléens » est bien plus récent. Ce fut Julien qui le mit à la mode, et même le rendit officiel, en y attachant une nuance de raillerie et de mépris. Juliani Epist., vii ; Grégoire de Nazianze, Orat. IV (invect. i), 76 ; S. Cyrille d’Alex., Contre Julien, II, p. 39 (édit. Spanheim) ; Philopatris, dialogue attribué faussement à Lucien, et qui est en réalité du temps de Julien, § 12 ; Théodoret, Hist. eccl., III, 4. Je pense que, dans Épictète (Arrien, Dissert. IV, vii, 6) et dans Marc-Aurèle (Pensées, XI, 3), ce nom ne désigne pas les chrétiens, mais qu’il faut l’entendre des « sicaires » ou zélotes, disciples fanatiques de Juda le Galiléen ou le Gaulonite et de Jean de Gischala.