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Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/377

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subsister[1]. Mais Auguste avait manqué à tous les devoirs du vrai politique, en laissant l’avenir au hasard. Sans hérédité régulière, sans règles fixes d’adoption, sans loi d’élection, sans limites constitutionnelles, le césarisme était comme un poids colossal sur le pont d’un navire sans lest. Les plus terribles secousses étaient inévitables. Trois fois, en un siècle, sous Caligula, sous Néron et sous Domitien, le plus grand pouvoir qui ait jamais existé tomba entre les mains d’hommes exécrables ou extravagants. De là des horreurs qui ont été à peine dépassées par les monstres des dynasties mongoles. Dans cette série fatale de souverains, on en est réduit à excuser presque un Tibère, qui ne fut complètement méchant que vers la fin de sa vie, un Claude, qui ne fut que bizarre, gauche et mal entouré. Rome devint une école d’immoralité et de cruauté. Il faut ajouter que le mal venait surtout de l’Orient, de ces flatteurs de bas étage, de ces hommes infâmes que l’Égypte et la Syrie envoyaient à Rome[2], où, profitant de l’oppression des vrais Romains, ils se sentaient tout--

  1. Tacite, Ann., I, 2 ; Florus, IV, 3 ; Pomponius, dans le Digeste, l. I, tit. ii, fr. 2.
  2. Helicon, Apelle, Eucère, etc. Les « rois » d’Orient étaient considérés par les Romains comme les maîtres en tyrannie de leurs mauvais empereurs. Dion Cassius, LIX, 24.