Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/386

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rité et de bien-être comme on n’en avait jamais connu[1] ; il est même permis d’ajouter sans paradoxe, de liberté. D’un côté, la liberté du commerce et de l’industrie, dont les républiques grecques n’avaient pas l’idée, devint possible. D’un autre côté, la liberté de penser ne fit que gagner au régime nouveau. Cette liberté-là se trouve toujours mieux d’avoir affaire à un roi ou à un prince qu’à des bourgeois jaloux et bornés. Les républiques anciennes ne l’eurent pas. Les Grecs firent sans cela de grandes choses, grâce à l’incomparable puissance de leur génie ; mais, il ne faut pas l’oublier, Athènes avait bel et bien l’inquisition[2]. L’inquisiteur, c’était l’archonte-roi ; le saint office, c’était le portique Royal, où ressortissaient les accusations « d’impiété ». Les accusations de cette sorte étaient fort nombreuses ; c’est le genre de causes qu’on trouve le plus fréquemment dans les orateurs attiques. Non-seulement les délits philosophiques, tels que nier Dieu ou la Providence, mais les atteintes les plus légères aux cultes municipaux, la prédication de religions étrangères, les infractions les plus puériles à la scrupuleuse législation des mystères, étaient des crimes entraînant la mort. Les dieux qu’Aristophane bafouait

  1. Tacite. Ann., 1, 2.
  2. Étudiez le caractère d’Euthyphron dans Platon.