Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/452

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Quand on arriva au lieu d’exécution, on proposa encore aux victimes la vie pour leur abjuration. Un bourreau imagina de dire à un père que, s’il ne cédait pas, il couperait la gorge à ses deux fils sur sa poitrine. C’étaient deux petits garçons, dont l’aîné avait quatorze ans, et qui, rouges de leur propre sang, les chairs calcinées, écoutaient froidement le dialogue ; le père répondit, en se couchant par terre, qu’il était prêt, et l’aîné des enfants, réclamant avec emportement son droit d’aînesse, demanda à être égorgé le premier[1]. Enfin, tout fut achevé ; la nuit tomba sur un amas de chairs informes ; les têtes étaient attachées en paquets au poteau de justice, et les chiens des faubourgs se dirigeaient par troupes de ce côté. »

Cela se passait en 1852. La secte de Mazdak, sous Chosroès Nouschirvan, fut étouffée dans un pareil bain de sang. Le dévouement absolu est pour les natures naïves la plus exquise des jouissances et une sorte de besoin. Dans l’affaire des bâbis, on vit des gens qui étaient à peine de la secte venir se dé-

  1. Un autre détail que je tiens de source première est celui-ci : Quelques sectaires, qu’on voulait amener à rétractation, furent attachés à la gueule de canons, amorcés d’une mêche longue et brûlant lentement. On leur proposait de couper la mèche s’ils reniaient le Bâb. Eux, les bras tendus vers le feu, le suppliaient de se hâter et de venir bien vite consommer leur bonheur.