Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/54

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

dit-on, n’a pu se faire que par une intervention directe de la Divinité ; pourquoi cette intervention ne se produirait-elle pas dans les autres moments décisifs du développement de l’univers ? » Je n’insisterai pas sur l’étrange philosophie et l’idée mesquine de la Divinité que renferme une telle manière de raisonner ; car l’histoire doit avoir sa méthode indépendante de toute philosophie. Sans entrer le moins du monde sur le terrain de la théodicée, il est facile de montrer combien une telle argumentation est défectueuse. Elle équivaut à dire que tout ce qui n’arrive plus dans l’état actuel du monde, tout ce que nous ne pouvons pas expliquer dans l’état actuel de la science, est miraculeux. Mais alors le soleil est un miracle, car la science est loin d’avoir expliqué le soleil ; la conception de chaque homme est un miracle, car la physiologie se tait encore sur ce point ; la conscience est un miracle, car elle est un mystère absolu ; tout animal est un miracle, car l’origine de la vie est un problème sur lequel nous n’avons encore presque aucune donnée. Si on répond que toute vie, toute âme est, en effet, d’un ordre supérieur à la nature, on joue sur les mots. Nous voulons bien l’entendre ainsi ; mais alors il faut s’expliquer sur le mot miracle. Qu’est-ce qu’un miracle qui se passe tous les jours et à toute heure ? Le miracle n’est pas l’inexpliqué ;