Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/188

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l’assaut des grandes villes où elles viennent chercher fortune, ils étaient serviables et humbles. Avec eux débarquaient des troupes de Grecs, d’Asiates, d’Égyptiens, tous parlant grec. Rome était à la lettre une ville bilingue[1]. La langue du monde juif et du monde chrétien de Rome fut pendant trois siècles le grec[2]. Le grec était à Rome la langue de tout ce qu’il y avait de plus méchant et de plus honnête, de meilleur et de plus bas. Rhéteurs, grammairiens, philosophes, dignes pédagogues, précepteurs, domestiques, intrigants, artistes, chanteurs, danseurs, proxénètes, artisans, prédicateurs de sectes nouvelles, héros religieux, tout ce monde parlait grec. L’ancienne bourgeoisie romaine perdait chaque jour du terrain, noyée qu’elle était dans ce flot d’étrangers.

Il est infiniment probable que, dès l’an 50, quelques juifs de Syrie, déjà chrétiens, entrèrent dans la capitale de l’empire et y semèrent leurs idées. En

  1. L’épigraphie de la ville de Rome en fait foi ; la littérature, plus encore.
  2. Pour les juifs, voir Garrucci, Cimitero degli antichi Ebrei, p. 63 ; Dissert. arch., II, p. 176-177, etc. Le quart seulement des inscriptions juives de Rome est en latin. — Pour les chrétiens, voir de Rossi, Inscr. christ. urbis Romæ, I. — Juifs et chrétiens écrivaient souvent le latin en caractères grecs. Garrucci, Cim., p. 67, et Dissert., II, p. 164, 176, 180, 181, 183, 184.