Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 3 Saint Paul, Levy, 1869.djvu/562

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Si le peuple juif d’ailleurs s’est vu supplanté, c’est sa faute. Il a eu trop de confiance dans les œuvres de la Loi ; il a cru par ces œuvres arriver à la justice. Les gentils, débarrassés de cette pierre d’achoppement, sont entrés plus facilement dans la vraie doctrine du salut par la foi. Israël a péché par trop de zèle pour la Loi et pour avoir fait trop de fond sur la justice personnelle qui s’acquiert par les œuvres. Cela lui a fait oublier que la justice vient de Dieu seul, qu’elle est un fruit de la grâce et non des œuvres ; cela lui a fait méconnaître l’instrument de cette justice, qui a été Jésus[1].

Dieu a-t-il donc répudié son peuple ? Non. Dieu, il est vrai, a trouvé bon d’aveugler et d’endurcir le plus grand nombre des Juifs. Mais le premier noyau d’élus a été pris au sein d’Israël. En outre, la perdition du peuple hébreu n’est pas définitive. Cette perdition a eu seulement pour objet de sauver les gentils et de provoquer entre les deux branches des élus une salutaire émulation. C’est un bonheur pour les gentils que les Juifs aient un moment failli à leur vocation, puisque c’est à leur défaut et grâce à leur défaillance que les gentils ont pu leur être substitués. Mais, si une défaillance du peuple juif, si un moment de retard de sa part a été le salut du monde, que sera son

  1. Rom., ix, 30-33, et x entier.