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Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/143

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« lumière », « ténèbres », « vie », « amour », etc., deviennent dominants[1]. La philosophie syncrétique du gnosticisme se fait déjà sentir. La question de la justification par Jésus n’est plus aussi vive ; la guerre de la foi et des œuvres semble apaisée au sein de l’unité de la vie chrétienne, composée de science et de grâce[2]. Christ, devenu l’être central de l’univers, concilie en sa personne divinisée l’antinomie des deux christianismes. Certes, ce n’est pas sans motifs qu’on a suspecté l’authenticité de tels écrits ; ils ont pour eux cependant de si fortes preuves[3], que nous aimons mieux attribuer les différences de style et de pensée dont nous venons de parler à un progrès naturel dans la manière de Paul. Les écrits antérieurs et certainement authentiques de Paul contiennent le germe de ce langage nouveau. « Christ » et « Dieu » s’y échangent presque comme des synonymes ; Christ y exerce des fonctions divines ; on l’invoque comme Dieu ; il est l’intermédiaire obligé auprès de Dieu. L’ardeur avec laquelle on s’attachait à Jésus faisait qu’on lui rapportait toutes les théories qui avaient

  1. Col., i, 12, 13 ; iii, 4 ; Ephes., v, 8, 11, 13. Comp. Phil., ii, 16.
  2. Col., i, 10 ; iii, 9-10 ; Eph., ii, 8-10. Notez ἐξ ἔργων, et non plus ἐξ ἔργων νόμου (Gal., ii, 16), qui n’aurait guère eu de sens pour les hellénistes purs.
  3. Voir Saint Paul, introd., p. vii et suiv.