Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/273

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supplice comme par miracle, aura quitté la ville sans délai ; dès lors on peut trouver naturel qu’il se soit réfugié en Asie. Comme presque toutes les données relatives à la vie des apôtres, les traditions sur le séjour de Jean à Éphèse sont sujettes au doute ; elles ont cependant aussi leur côté plausible, et nous inclinons plutôt à les admettre qu’à les rejeter[1].

  1. Le principal argument se tire de l’Apocalypse. Si le livre est de Jean l’apôtre, la chose est certaine. Si le livre est de quelqu’un qui a voulu le faire passer pour un ouvrage de Jean l’apôtre (on suppose alors l’apôtre mort avant 68 ; car un tel faux n’est guère admissible de son vivant), on est frappé de la circonstance que la vision de l’apôtre est censée avoir lieu à Patmos, endroit où l’on ne s’arrêtait qu’en allant en Asie ou en revenant d’Asie ; il est remarquable surtout que le faussaire fait parler l’apôtre aux Églises d’Asie comme ayant autorité sur elles et connaissant leurs plus intimes secrets. Conçoit-on l’effet qu’eussent produit les trois premiers chapitres sur des gens qui savaient parfaitement que l’apôtre Jean n’avait jamais été à Patmos ni chez eux ? Denys d’Alexandrie (dans Eus., H. E., VII, 25) a bien vu cela, et pose en principe que l’auteur de l’Apocalypse ne peut être qu’un des hommes apostoliques qui ont été en Asie. Reste l’hypothèse où l’Apocalypse serait l’ouvrage d’un homonyme de l’apôtre Jean, hypothèse de toutes la plus invraisemblable. — Les témoignages directs sur le séjour de Jean à Éphèse sont du dernier quart du second siècle. Apollonius, d’après Eusèbe, H. E., V, 18 ; Polycrate, évèque d’Éphèse (circonstance à noter), dans Eus., III, 31 ; V, 24 ; Irénée, Adv. hær., II, xxii, 5 ; III, i, 1 ; iii, 4 ; xi, 1 ; V, xxvi, 1 ; xxx, 1, 3 ; xxxiii, 4 ; lettre à Victor (Eus., H. E., V, 24), et surtout lettre à Florinus (Eus., H. E., V, 20), morceau capital dans la question, dont l’authenticité n’est guère douteuse, depuis