Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/56

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Dieu, gouvernant les peuples, et si totalement différent du Messie de Galilée que le Voyant à son aspect frissonne et tombe à demi mort. Un homme qui avait connu le vrai Jésus pouvait difficilement, même au bout de trente-six ans, avoir subi une telle modification dans ses souvenirs. Marie de Magdala, apercevant Jésus ressuscité, s’écrie : « O mon maître ! » et Jean ne verrait le ciel ouvert que pour y retrouver celui qu’il aima transformé en Christ terrible !… Ajoutons que l’on n’est pas moins étonné de voir sortir de la plume d’un des principaux personnages de l’idylle évangélique une composition artificielle, un vrai pastiche, où l’imitation à froid des visions des anciens prophètes se montre à chaque ligne. L’image des pêcheurs de Galilée qui nous est offerte par les Évangiles synoptiques ne répond guère à celle d’écrivains, de lecteurs assidus des anciens livres, de rabbins savants. Reste à savoir si ce n’est pas le tableau des synoptiques qui est faux, et si l’entourage de Jésus ne fut pas beaucoup plus pédant, plus scolastique, plus analogue aux scribes et aux pharisiens, que le récit de Matthieu, Marc et Luc ne porterait à le supposer.

Si l’on admet l’hypothèse que nous avons dite, et d’après laquelle Jean aurait plutôt accepté l’Apocalypse qu’il ne l’aurait écrite de sa main, on obtient un autre avantage, c’est d’expliquer comment le livre