Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/612

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vie propre. Si le temple avait survécu, le christianisme eût été certainement arrêté dans son développement. Le temple survivant aurait continué d’être le centre de toutes les œuvres judaïques. On n’eût jamais cessé de l’envisager comme le lieu le plus saint du monde[1], d’y venir en pèlerinage, d’y apporter des tributs. L’Église de Jérusalem, groupée autour des parvis sacrés, eût continué, au nom de sa primauté, d’obtenir les hommages de toute la terre, de persécuter les chrétiens des Églises de Paul, d’exiger que, pour avoir le droit de s’appeler disciple de Jésus, on pratiquât la circoncision et on observât le code mosaïque. Toute propagande féconde eût été interdite ; des lettres d’obédience signées de Jérusalem eussent été exigées du missionnaire[2]. Un centre d’autorité irréfragable, un patriarcat composé d’une sorte de collège de cardinaux, sous la présidence de personnes analogues à Jacques, juifs purs, appartenant à la famille de Jésus, se fût établi[3], et eût constitué un immense danger pour l’Église naissante.

  1. Voir ci-dessus, p. 401.
  2. Voir Saint Paul, p. 292, et surtout les lettres en tête des Homélies pseudo-clémentines.
  3. De nos jours, un fait analogue se produit dans le judaïsme, et semble susceptible d’acquérir beaucoup de gravité. Les juifs de Jérusalem passent tous pour des hakamim ou savants, n’ayant d’autre métier que la méditation de la Loi. Comme tels, ils ont droit